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ConnexionThe way it was ft. Clea
THE WAY IT WAS
stephen & clea
◊ ◊ ◊
Stephen était face à tous ses confrères œuvrant comme lui au sein de l'Académie pour former les magiciens et magiciennes de demain. Chaque semaine, une réunion était organisée pour échanger sur les étudiants, les difficultés, les choses importantes qui pouvaient être notées par les professeurs.
« Merci à tous. Vous pouvez disposer. » Bien sûr, le Suprême de cette dimension prenait depuis le début grand soin de rester impassible et professionnel malgré la présence de Clea. Néanmoins, son regard ne put s'empêcher de s'attarder sur la silhouette de la Faltine qui quittait la pièce avec les autres, refusant, comme chaque jour, de rester seule avec celui qui autrefois partageait sa vie. En-dehors de l'école, de ses enjeux, et des problématiques de protection des dimensions, ils ne s'étaient jamais accordé de temps pour parler, ou du moins, elle ne lui laissait aucune latitude pour le faire.Le profil de Rahl accrocha ses yeux entre les silhouettes sortantes, tandis qu'il avait semblait-il attendu que sorte Clea pour lui parler. Stephen se raidit aussitôt, blessé, irrité plus que de raison par cette complicité ostentatoire qui courrait à travers le Sanctum depuis qu'elle y était revenue pour enseigner à sa demande, accompagnée de son meilleur général et bras-droit. Et amant. La porte se referma quelque peu sèchement derrière les sortants sur seul ordre psychique du maître des lieux demeurant à son bureau, et qui refusaient de souffrir cette vision une seconde de plus.
Maybe we just drifted apart
Le jardin botanique de Brooklyn vivait sa dernière demi-heure d'ouverture de la journée, et Stephen, vêtu avec cette élégance nonchalante habituelle qui était la sienne quand il était en civil, promenait lentement au milieu des allées fleuries et des parcs d'arbres colorés. Bientôt, la fermeture fut annoncée, et le public invité à quitter les lieux. Stephen resta sur un banc, observant calmement fleurs, arbres, et oiseaux faisant leur manège dans ce petit havre naturel, le temps que tout le monde soit parti, et d'un geste de la main, détourna l'attention des agents rabatteurs du parc qui passèrent ainsi sans sembler le voir.
Il attendit un bon quart d'heure supplémentaire, afin de s'assurer que le jardin était définitivement vide, abîmé dans de mélancoliques pensées malgré lui concernant Clea, au lieu de réfléchir pleinement à cette enquête mystique survenue en fin de journée pour l'arracher du Sanctum.
Le Sorcier se leva enfin, et rejoignit l'étang principal, vaste mais artificiel et décoratif, sur lequel un petit pont de bois permettait de rejoindre une île en plein milieu. Il l'emprunta, et une fois sur cette dernière, après quelques observations, il descendit de l'île jusque dans l'eau finalement peu profonde selon certains endroits. Suivant ses premières déductions, il marcha ainsi, l'eau jusqu'aux genoux - rien que la magie ne lui permettrait pas de sécher en une seconde ensuite - jusqu'au centre du bassin, les divers poissons s'écartant sur son passage perturbateur.
Repérant quelque chose, il plongea le bras dans l'eau et en ressortit une sorte de morceau d'un alliage difforme aux rainures légèrement cuivrées, dont certaines formaient des inscriptions. Il semblait brisé car elles étaient coupée en plein milieu. Il arqua un sourcil et regarda autour de lui. Il tenta un sortilège de révélation puis d'attraction, mais aucun élément semblable n'émergea de la surface. Il s'en était douté, ces bouts d'artefacts "résistaient" et "refusaient d'être dénichés" facilement.
Pourtant il lui faudrait bien retrouver toutes les parties pour savoir de quoi il retournait exactement. Il regarda le parc autour de l'étang au sein duquel il se trouvait. La nuit était presque entièrement tombée, tout était silencieux, apaisant, calme, seules quelques lampes d'extérieur discrètes éclairaient les allées autour du petit lac. Peut-être trop apaisant, véritable néant laissant trop de place à ses pensées personnelles qui tentaient de s'incruster au milieu de ses réflexions sur son enquête mystique. Finalement, il céda.
« Clea... If you are not too busy, would you mind joining me... I might be on a case related to some artefacts from your dimension, I need your insight, just to be sure... please, » demanda-t-il à la Faltine, en la contactant par télépathie mystique. Tête baissée sur son bout de métal d'une autre dimension, Stephen s'en voulait. Car évidemment, il mentait. Bien qu'il ignorait de quoi il retournait, il était certain d'une chose : que cela n'avait rien à voir avec la Dark Dimension, dont il savait reconnaître depuis bien longtemps désormais les éléments, grâce à Clea d'ailleurs en plus de ses nombreux grimoires et aventures dans ce royaume face au Terrible.
Mais il lui fallait un prétexte pour l'appeler elle et non quelque autre sorcier ou sorcière du Sanctum. Viendrait-elle, il n'en savait rien. Trop de non-dits, de rancoeurs silencieuses, les tenaient éloignés depuis des années. Il savait seulement que si seul le silence lui répondait, son coeur n'en serait que plus lourd encore.
(c) oxymort
✶ Clea n’avait pas imaginé que son retour dans la dimension terrestre serait synonyme de réunions presque ennuyantes mais obligatoires pour discuter de l’avancée des progrès des élèves. Elle ne pouvait nier le potentiel de la plupart d’entre eux, mais certains semblaient bien décidés à ne pas fournir le moindre effort. Elle n’avait pourtant rien dit sur les élèves, rien à signaler avait-elle simplement dit. Tout ce qui importait avait été mentionné par les autres professeurs et moins elle en disait lors de ses réunions, plus facilement elle pouvait éviter le regard de celui qui autrefois fut son amant, celui qui continuait de faire battre son cœur malgré ses tentatives pour l’oublier. Elle s’empressa de quitter la pièce lorsque la réunion fut terminée. Enseigner au sein de l’académie était une chose, après tout, c’était un objectif intéressant, stimulant pour la faltine, mais tout se passait au mieux lorsqu’elle n’avait pas à interagir avec Stephen.
Rahl rejoignit Clea juste avant que la porte ne se referme brusquement une fois tout le monde sorti. Tout le monde, sauf lui, évidemment. Son regard passa de la porte à son bras droit qui ne disait rien. Il était au courant de tout, tout ce qu’il y avait pu avoir entre Clea et Stephen. Elle avait pris la décision d’être honnête, de ne rien lui cacher lorsqu’elle avait décidé de le prendre pour amant. Et s’il était un amant plus que convenable, il n’y avait pas cette étincelle, et Rahl avait bien compris qu’il n’y en aurait jamais, peu importe le nombre de millénaires qui pouvait s’écouler.
Rahl ne quittait presque jamais les côtés de Clea depuis leur arrivée dans cette dimension, et ce n’était pas pour une quelconque histoire de sentiment ou de passion, mais pour des raisons sécuritaires. Elle avait beau tenter de le rassurer, pour lui, c’était la première fois dans cette dimension étrange et il préférait la savoir en sécurité à ses côtés. Il ne doutait pas des capacités de Clea à se défendre, mais il la savait bien plus fragile et la tête ailleurs. Malgré son omniprésence, la faltine parvient tout de même à prendre un moment pour elle de temps à autres.
« I’d rather be by myself for now, Rahl. Go find the others, they also need their general. »
Et sans un mot, il s’éclipse. Obéissant, soumis, sans objection, tout l’inverse de Strange, et c’est sûrement ça qu’elle aimait chez lui, sa manière bien à lui de lui tenir tête et elle faisait de même. Un léger sourire se dessine timidement sur les lèvres de Clea à cette pensée, mais elle la chasse de son esprit. Elle se souvient bien trop des conséquences de leur amour, de ce que ça a impliqué pour sa rébellion, pour son peuple, pour son trône.
Clea revient au Sanctum après avoir arpenté les rues de Manhattan pour faire le vide dans son esprit autrement qu’en méditant. Si elle doit être amenée à vivre dans cette dimension pour un temps, elle doit reprendre ces habitudes d’humains et ça passe par porter des vêtements typiquement new yorkais. Ce jour-là, elle portait une robe midi aux couleurs de l’automne. La météo était encore clémente alors elle pouvait se permettre de se passer d’une veste, bien que de par sa nature, Clea n’était pas sensible aux températures de la même manière, supportant un peu plus le froid et la chaleur que l’humain moyen.
En refermant la porte derrière elle, elle voit Bats s’avancer vers elle et s’asseoir.
« Welcome home, Clea. »
Les mots font écho dans son esprit. Elle se refusait d’appeler le Sanctum sa maison de nouveau, et pourtant, elle s’y est toujours bien sentie. Même après toutes ces années, tous ces échecs, ces déchirures, ces souvenirs, le Sanctum lui donne l’impression d’être chez elle. Parfois même davantage que sa propre dimension. On ne peut pas dire que sur ses milliers d’années d’existence, elle ait réellement pu vivre dans la Dimension Noire comme chez elle. Entre sa vie de prisonnière ou ces années à se rebeller, seules quelques années en tant que souveraine ont changé la donne, mais ici, au Sanctum, elle a toujours été la bienvenue, et elle a toujours trouvé une certaine chaleur.
« Yes, I’m home. Thank you Bats. »
Elle se dirige vers sa chambre mais elle se stoppa net dans son élan lorsqu’une voix vint résonner dans sa tête. Stephen. C’était comme s’il l’avait entendu dire qu’elle considérait le Sanctum était sa maison. Si elle l’avait évité tout ce temps, il n’avait pas pour autant insisté pour lui parler, respectant son choix de garder cette distance. Mais là, il céda, demandant l’aide de la faltine concernant des artefacts. Elle resta silencieuse pendant un temps. Des artefacts de la Dimension Noire qui se trouveraient à dans cette dimension, et plus précisément à New York ? Elle ne peut s’empêcher de frémir à cette idée. Même s’il s’agissait d’artefacts d’une autre dimension encore, elle serait probablement tentée d’y aller, après tout, la collectionneuse en elle ne peut nier l’intérêt porté à cette requête.
Pourtant elle ne dit rien, marchant vers sa chambre comme si de rien n’était. Elle réfléchit, sa décision est pourtant évidente, mais elle le fait patienter, le fait languir, ne voulant pas craquer aussi rapidement, le laissant croire qu’elle n’attendait que ça. Elle arrive dans sa chambre, attrape un manteau, et finalement décide de se téléporter là où se trouve Stephen.
Pour la première fois depuis plus d’une décennie, ils se retrouvent tous les deux. Il n’y a personne autour d’eux, pas une seule âme pour venir les déranger ou pour témoigner de leur rencontre. Elle analyse les environs, apparemment, les artefacts dont il parlait se trouveraient dans un jardin qui, malgré la lumière qui s’atténue petit à petit, est splendide. Toujours la même attitude qu’à l’académie, la tête haute et un visage impassible, elle s’approche de son ancien amant. Pas d’étreinte ou d’embrassade, bien que la tentation soit forte. De le voir, les traits de son visage, sa silhouette, deviner son odeur, sentir sa présence non loin d’elle, toutes ces petites choses réveillent la passion qu’elle tente de tarir depuis si longtemps.
« I came for the artifacts. What do you need to know ? Let me know how I can help then I can go back… to the Sanctum. »
Elle ne peut le dire devant lui, elle ne peut parler de foyer, de rentrer chez elle.
Elle se tourne vers le lac, même sans noter les vêtements complètements imbibés de Stephen, elle a remarqué la présence de l’artefact au fond du lac. Elle s’approche doucement, intriguée, mais elle remarque quelque chose d’assez évident. Elle tente de cacher son sourire avant de se tourner de nouveau vers le Docteur.
« It’s definitely not from my dimension. But you already knew that, did you not ? »
THE WAY IT WAS
stephen & clea
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Elle était venue. Elle était venue et bien qu'il l'avait ardemment désiré, Stephen se sentit l'espace d'un instant presque désarmé par son arrivée. Une partie de lui avait pensé que seul le silence et la solitude lui répondraient. A la place, cette silhouette dont il connaissait chaque contour par coeur, et qui le renvoyait vers mille souvenirs, mille joies, mille peines. Il garda contenance, et passé ce premier moment de silencieuse surprise, n'afficha que son attitude habituelle : celle du Sorcier Suprême qui travaillait et était donc concentré, neutre. Soit disant.
Il ne fallut pas longtemps pour que la Faltine ne révèle à haute voix la supercherie grossière mise en place par Stephen, qui prit grand soin, en toute innocence, de poursuivre ses recherches, tête baissée, s'éloignant lentement dans l'eau pour y chercher le fragment manquant de l'artefact après qu'elle eut observé celui dans sa main. Mais il sentit son regard et le sourire dans sa voix lorsqu'elle le questionna, cette voix qui lui arrachait de subtils frissons après une décennie sans l'entendre d'aussi près, rien que pour lui et sans personne autour.
« Oh, really ? Thank you then, for shortening the possibilities. I knew I made the right choice calling you. » Il se retourna vers elle avec un même sourire en coin, prouvant bel et bien qu'il s'était gentiment joué d'elle pour la faire venir. Au fond de lui, derrière ces quelques mots joueurs, le stress. Elle aurait pu, et pourrait encore, s'agacer de s'être fait traîner ici pour rien. Elle pourrait l'engueuler et repartir comme elle était venue, et mettre ainsi un arrêt net à toute relation dépassant le cadre professionnel. Stephen avait l'impression de jouer un numéro d'équilibriste depuis qu'il était parvenu à la convaincre d'enseigner au Sanctum et donc d'y revenir. Elle avait accepté, mais elle le fuyait. Compliqué.
Son oeil fut néanmoins attiré par une nouvelle rune scintillante sous la surface. « There you are. » Il se pencha, plongea la main dans l'eau et récupéra l'autre morceau de l'artefact. Il tenta de l'assembler avec le premier, et reforma une sorte de cube aux runes enfin complètes et qu'il put lire. « Mmh. I think someone came into possession of this artefact without knowing what it was. Probably got scared when he triggered it randomly, and decided to throw it away here, » médita le Sorcier, perdu temporairement dans ses réflexions en observant la ville au loin et le parc autour, enfin couvert de la douceur de la nuit et de ses astres.
Il marcha vers la petite île pour revenir auprès de Clea et d'un geste sécha magiquement ses vêtements, avant de sceller le cube par un sortilège pour qu'il redevienne un seul bloc. « But it was broken, so according to the runes, we might have an Elemental - my bet on a herbal one of course - on the loose in the park. Not evil, just... primitive. It is quite a good place to hide and thrive for an entity like that, » constata-t-il en faisant rebondir nonchalamment le cube dans sa paume marquée de cicatrices. Mouvement qui cachait aisément les micro-tremblements qui parfois reprenaient le dessus sur ses mains blessées de longue date. Ne pas guérir ses mains par magie pour garder le souvenir de ce jour fatidique qui avait bouleversé son existence était un choix délibéré.
Dans le silence apaisant mais révélateur du jardin, il finit par cesser de fuir l'évidence et son visage se releva face à celui de son interlocutrice, qui après tant d'années, l'intimidait quelque peu comme au premier jour. Même depuis son retour ils n'avaient pas été seuls ensemble hormis le temps de quelques mises au point pour l'enseignement, et encore, Bats était souvent là, ou Wong. Il capitula dans un soupir. « I... I just wanted to know how you were doing... After all, it's been quite a long time... » And you have been avoiding me since you came back. Une pensée qu'il garda pour lui mais qui se sous-entendait aisément pour justifier sa ruse. Son timbre s'était effondré partiellement sur les derniers mots en réalisant leur signification réelle. Croiser son regard en face à face ne manqua pas de malmener ses émotions sans pour autant trop en laisser paraître.
Il se rendait compte plus que jamais, ainsi seul avec elle, à quel point le poids de son absence lui pesait encore si douloureusement, dans un contraste cruel. Ne pas savoir comment elle allait, quelle était sa vie, qu'il partageait si agréablement autrefois. Aujourd'hui, deux étrangers qui peinaient à se parler. Plus de dix années de silence et de vide. Qu'avait-elle vécu tout ce temps ? Allait-elle seulement bien derrière ce masque de reine déchue mais fière qu'elle aussi savait si ardemment arborer en toute occasion ? Le flash de Rhal repassa devant ses iris et vrilla ses maigres espoirs. Contrairement à lui, elle avait tourné la page depuis longtemps. Il soupira.
« I'm sorry... It was stupid to trick you like this. Old habit I guess. Of course you can go back to the Sanctum, you might have your own business to take care of. I can perfectly handle this case alone, it's not even a threat, just... a lost being freed in a world where it does not fit. » Résonnance étonnante avec ce qu'avait pu être autrefois la Faltine, lorsque libérée de sa prison, elle s'était retrouvée exilée et propulsée dans une dimension dont elle ne savait rien, avec pour seul point de repère un sorcier étranger. Il tourna la tête vers le petit pont qui menait au coeur du parc, densifié par une végétation variée dans laquelle il allait devoir se diriger pour trouver l'entité. Mais le coeur n'y était que peu. Ce dernier ne voulait qu'une chose, prolonger cette proximité avec celle vers qui il était resté tourné à travers les ans, sans faillir. Même une simple amitié serait cruelle, mais toujours bien moins que de ne plus avoir aucun lien avec elle.
(c) oxymort
✶ Il ne fallut pas bien longtemps à Clea pour comprendre que cet appel à l’aide était probablement un piège tendu par Stephen. Elle aurait pu simplement se téléporter jusqu’au Sanctum sans rien dire, peu fière de s’être fait avoir, mais elle lui laisse une deuxième chance de rendre ce déplacement non vain. Après tout, elle porte un réel intérêt aux divers artefacts de chaque dimensions dont elle connaît l’existence. Parmi tous ces objets, elle sait qu’il y en a quelques uns dont elle pourra faire usage, le moment voulu, pour vaincre son oncle et rétablir l’ordre dans la Dimension Noire.
Elle se tourne finalement vers lui, lui faisant face pour la première fois depuis bien longtemps. Depuis son retour dans cette dimension elle avait tout fait pour l’éviter, pour ne pas avoir à soutenir son regard, ne pas lui parler, ne pas se trouver trop proche de lui pour ne pas ressentir ces frissons qu’il a toujours provoqué en elle. Elle s’est cachée derrière la présence de Rahl, amant qui, elle en est certaine, a dû rendre Stephen jaloux plus d’une fois, ou du moins, le tenir suffisamment à distance pour qu’elle n’ait pas à le confronter. Elle est lâche, elle le sait, mais elle n’est pas prête à lui dire ce qu’elle ressent, elle n’est pas prête à prendre le risque de retomber dans ses bras. Car Rahl, elle le lâcherait à n’importe quel instant pour Stephen.
Malgré la supercherie, il semblait malgré tout réellement intéressé par l’artefact brisé qui s’était retrouvé dans l’étang du jardin botanique. Et finalement, il trouva la dernière pièce. Elle aurait pu partir, mais elle était tout aussi intriguée que lui par cet étrange cube aux runes qu’elle parvenait à lire maintenant que l’objet était complet. Elle s’approcha à une distance correcte, contrôlée, mais même avec cette distance, elle parvenait à discerner l’odeur de son ancien amant, une odeur enivrante et qui fait remonter des souvenirs à la surface.
« Probably, yes. The question is, where was it found and why was it there ? It was probably in the hands of a regular human, and if this kind of artifacts ends up in the ends of someone who is not familiar with magic, it’s probable because it was lost somewhere it was not supposed to be. »
Généralement, ces objets sont cachés, inaccessibles, et seul le savoir de leur existence et d’un certain degré de magie permettent de les retrouver. Cet artefact ne provenait certainement pas de la Terre et encore moins de la Dimension Noire. Un tel artefact brisé ne présage jamais rien de bon et Stephen ne fait que confirmer ce que la faltine pensait : un être mystique est en liberté, et plus précisément un élémentaire.
« We should find it before someone else does, even if it’s not dangerous. Who knows what could happen ? »
Connaissant les humains, ils seraient capable de dégainer leur arme à feu pour s’en prendre à ce pauvre élémentaire juste par peur et par manque de jugement. Il leur en faut bien moins pour tirer sur leurs semblables, alors un élémentaire, elle n’ose même pas imaginer.
Le silence s’installe doucement alors que le ciel s’est définitivement assombri pour la nuit. Quelques grillons se font entendre, le bruit de l’eau ruisselant au travers du jardin, peu de lumière hormis celle des étoiles, de la lunes et des quelques réverbères qui entourent l’extérieur du jardin. Et voilà deux êtres mystiques qui se tiennent debout sans dire un mot, sans même se regarder. Jusqu’à ce qu’il brise le silence par un long soupir et puis quelques mots qui ne se rapportent pas ni à l’artefact, ni à la créature en liberté. Il lui demande simplement comment elle va, rappelant que le temps sans se donner de nouvelles avait été plutôt long. Sa gorge se noue, mais elle ne laisse rien transparaître. Leurs regards se croisent finalement après plus de dix ans. Dix années semblent être quelques minutes pour deux personnes comme Stephen et Clea, mais c’est un peu comme si elle avait retenu sa respiration durant tout ce temps. Elle hésite un moment, laissant un autre silence s’installer brièvement, mais elle finit par lui répondre.
« I’m… doing okay. I’ve been busy, as you know, but I’m okay. »
Elle ne lui renvoie pas la question, parce qu’elle n’y parvient pas. Elle sait qu’ils entameraient alors une conversation comme ils en ont toujours eu l’habitude, et si elle ne veut pas paraître trop dure en l’ignorant, elle ne parvient pas pour autant à relancer l’échange. Puis il ne relève pas, il se contente de présenter ses excuses pour l’avoir attirée ici de manière presque déloyale et il lui donne la permission de repartir, comme si elle avait besoin de son approbation pour se déplacer. Selon lui, il est capable de gérer l’élémentaire seul, puis les mots qu’il prononce font écho dans l’esprit de la faltine.
« And you think you can deal with a lost being by yourself ? I’m here now. I’m not gonna go back to the Sanctum without learning more about this artifact. It might not be dangerous, but I want to know more about it. »
Elle croise les bras puis, par la pensée, fait léviter le cube afin qu’il quitte l’emprise de Stephen et vienne se positionner devant elle. Elle observe attentivement les runes, mais contrairement à ce que disait le Sorcier Suprême, elle n’est pas certaine qu’il s’agisse d’un élémentaire de la terre ou des herbes.
« It could be any kind of elemental. Water, air, maybe not fire. We shouldn’t ignore those possibilities as well. »
Elle formule alors un sortilège permettant de désassembler les parties du cube afin d’analyser la manière dont il a été brisé, et pour essayer de retrouver l’endroit d’où il s’est échappé. Selon la position des morceaux, ils pourront alors partir d’un point de départ et chercher plus efficacement.
« Where did you find the other parts of the cube ? »
Elle est déterminée à résoudre ce mystère, restant professionnel. De cette manière, elle peut passer du temps avec lui, assouvir cette envie d’être à ses côtés, mais tout en évitant les silences gênants et les occasions de parler de ces dix dernières années ou même de sa décision de l’éviter.
THE WAY IT WAS
stephen & clea
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« I could not agree more. We risk escalation if people are confronted with something they don't understand. As always, humanity tends to be quite violent when it happens, out of fear... and stupidity. » Contrairement à ce qu'il redoutait, Clea ne profita pas de l'ouverture pour repartir, pour s'échapper de ce piège grossier dans lequel il l'avait attirée. L'énigme de l'artefact élémentaire, poursuivie par Stephen peu avant, acheva de l'intriguer à son tour. Il serait mentir de dire que le Suprême n'avait pas cherché à titiller cette curiosité qu'il lui connaissait. Ils étaient pareils sur bien des points, au final, et l'attrait pour les enquêtes mystérieuses était l'un des plus récurrents.
Stephen poussa un soupir résigné face à cette dernière évidence. Autrefois il jugeait bêtement de la même manière. Aujourd'hui, il savait distinguer les vraies entités malveillantes des persécutées se défendant face à l'ignorance, ce que beaucoup trop de personnes confondaient sans chercher plus loin, et abattaient avec la même détermination. Non, il était clair pour Stephen, comme pour Clea visiblement, que cet Elémental, quand bien même serait-il agressif car apeuré dans ce nouvel environnement, ne devrait pas succomber à l'ignorance haineuse des humains qui seraient malencontreusement sur sa route à la prochaine réouverture du parc le lendemain.
Mais ce fut le silence qui revint marquer la frontière entre cette conversation professionnelle, et celle bien plus personnelle que le Sorcier avait engagée. Une décennie où les non-dits restés en suspens avaient pu prospérer, et creuser ce fossé qui en devenait presque tangible dans ces moments de silence. Mais il aurait été trop beau d'espérer une réponse sincère et précise. Non. Bien sûr que non. Elle était, au fond, pire que lui à ce sujet. Elle resta donc évasive, bien qu'il devina qu'elle cachait ainsi forcément l'inverse de ce qu'elle disait. Le cube lui fut finalement subtilisé par lévitation tandis qu'elle se tenait de nouveau à quelques pas, et elle effaça ce nouveau silence par une reprise des déductions quant à l'artefact.
Il la regarda faire, n'écoutant cependant que d'une oreille tant son regard se perdit sur son visage concentré sur le cube. Elle ne pouvait pas aller bien. Elle était au Sanctum au lieu d'être dans sa dimension. Elle avait accepté ce poste alors qu'elle aurait dû régner, gouverner son peuple, lui offrir un royaume de paix et non le chaos. Si elle était là, c'était bien parce que le trône était occupé par un de ses ennemis, soit son oncle, soit sa propre mère. Dans tous les cas, un être malveillant et cruel.
« Those parts were underwater over here. The first one was on the land, in this area, » finit-il par répondre en désignant d'abord le lac d'où il était sorti peu avant, puis le rivage à la végétation luxuriante et aux grands arbres centenaires. Il ravala son envie de s'obstiner à parler d'elle alors qu'elle préférait botter en touche et ne parler que de l'enquête. Attitude qui faisait retomber comme un poids sur son être, un renvoi à distance pour lui imposer de ne pas continuer à chercher un quelconque rapprochement. Ca faisait mal.
« This way. » Il passa à côté d'elle et emprunta le petit pont pour retrouver la partie non-aquatique du parc. Il retrouva le banc où il avait patienté plus tôt, et s'enfonça derrière dans les fourrés et bosquets d'arbres et de fleurs. Il retrouva l'endroit où il avait détecté le premier fragment d'artefact avant de s'être reporté vers le lac, et désigna le sol, dont la terre du petit cratère était comme légèrement brûlée et striée de petites rainures, preuve de la présence du morceau.
Il la laissa examiner ce qu'il avait examiné lui-même plus tôt. Là encore, il la laissa faire ses déductions, lui expliquant brièvement les circonstances de la trouvaille - des plaintes étranges de la part de visiteurs dans l'après-midi. Se faisant, il décrocha doucement une fleur après quelques pas autour, tentant de rester maître de son esprit et de son coeur, qui perdaient davantage pieds à chaque fois que ses iris tombaient sur sa silhouette.
Alors il préféra se concentrer sur cette fleur dont il huma le parfum distraitement. Il ne pouvait s'empêcher de repenser à leurs premiers temps ensemble, peu après son arrivée dans la dimension terrestre. A découvrir la Terre, le monde, la vie, la faune, la flore. S'émerveiller de tout, de si peu, tout le temps, après des millénaires d'emprisonnement.
Et lui de tomber amoureux en silence, mentor dépassé par des émotions et des sentiments qu'il n'avait plus ressenti depuis la mort de sa famille. L'amour, simple, implacable. Il se revoyait lui expliquer le fonctionnement des végétaux sur Terre, pourquoi ils existaient, pourquoi l'oxygène émanait d'eux et permettait la vie humaine et animale. Pourquoi aussi, certaines plantes étaient indispensables aux potions et aux enchantements mystiques.
Il se revoyait à cet exact moment face à elle, lui montrer les parties d'une fleur spécifique qui étaient utiles à un baume de soin, avant de lui donner ladite fleur "pour qu'elle l'étudie". La lui donner d'une façon bien trop douce, bien trop calme, pour ne pas trahir cette tendresse qui naissait en lui, malgré lui, d'ailleurs. Trop de souvenirs furtifs de ce genre. Trop d'années passées depuis, surtout, pour qu'ils demeurent importants pour elle alors que lui les portait comme au premier jour. Pensée qui l'abattit insidieusement.
Ils regagnèrent finalement le chemin normal du parc. Stephen regarda un dernier instant la fleur qu'il avait jusqu'alors en main. Autrefois il lui aurait donnée. Ce soir, il la rejeta simplement sur la surface de l'eau non loin, où elle échoua dans un petit écho d'ondes liquides pour flotter tranquillement sans but. « Do you think you will still need to avoid me for a long time ? Like... more for a month or a decade ? If you do not want to see me, just... be clear with it. » Cette fleur avait fait plus de mal à sa patience que prévu, il fallait croire. Et son coeur battait désormais bien plus vite, bien plus fort, sous la peur face à cet abcès qu'il venait de crever et ses conséquences à venir. Etait-il agressif ? Il ne le voulait pas, mais tous ces silences gênés, ces semaines passées à l'éviter, lui pesaient bien trop pour ne pas céder sous ce poids.
« Listen, I just want to have some... some keys to know how to behave with you, you know. I do not want to fight, and the last thing I want is to make you go away again because of a misunderstanding between us. I need you... at the Academy. And I know you have your own life now. We both have. But... I just need to know if we will be... like this... forever or... or if one day, somehow, we will be able to be... friends again. »
Ses épaules s'affaissèrent dans un soupir presque épuisé par le poids de ces paroles qui voulaient tant sortir depuis des semaines. Les mots faisaient mal, très mal, a fortiori lorsqu'il s'agissait de parler d'amitié quand tout son être refusait ce compromis. Mais il n'avait pas le choix, il avait compris et il voulait crever des abcès sans pour autant la faire fuir.
Elle avait tourné la page, elle avait un nouvel amant, et elle éludait autant ses conversations que sa présence depuis son retour. Il tentait de se protéger, de prouver que lui aussi avait sa vie et que tout allait bien, que tout ce qu'il voulait c'était pouvoir lui reparler normalement sans tous ces silences et tous ces évitements. Mais face à elle, il avait toujours été un piètre menteur, contrairement à tous ses ennemis qu'il savait duper effrontément sans se trahir. Et ses yeux, si mêlés de vert de gris et de bleu, trahissaient probablement bien plus de sa tristesse face à l'état de leur relation qu'il ne voulait en laisser voir.
(c) oxymort
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